ASSOCIATION CANADIENNE DES PHYSICIENS ET PHYSICIENNES

MÉMOIRE PRÉSENTÉ AU COMITÉ PERMANENT DES FINANCES DE LA CHAMBRE DES COMMUNES

L’Association canadienne des physiciens et physiciennes (ACP) est l’organisation canadienne nationale représentant les physiciens et physiciennes de tous les secteurs, y compris les universités, les laboratoires gouvernementaux et le secteur privé.

La physique est la plus fondamentale des sciences et elle joue un rôle essentiel pour l'avancement de toutes les autres sciences, de la technologie et de la médecine. Les progrès réalisés en physique ont été le fondement des technologies clés dont les répercussions ont grandement amélioré nos vies, y compris le Web[1] ! Les nouveaux principes fondés sur la physique et les découvertes qui sont faites entraînent de nombreuses autres percées remarquables. Selon certaines estimations, les inventions réalisées grâce à la physique quantique seulement représentent plus de 25 % du PIB des pays industrialisés[2] .

Résumé : La croissance de l’emploi et la prospérité continue dépendent de plus en plus de la capacité qu’a un pays d’innover. On s’entend généralement pour dire que le rôle joué par la recherche fondamentale au chapitre de l’innovation, principalement dans le milieu universitaire, est essentiel.Comprenant cela, l’Union européenne a récemment proposé[3] une augmentation de 45 %, tenant compte de l’inflation, de la recherche et de l’innovation dans son prochain plan de sept ans! La recherche fondamentale universitaire revêt une importance toute particulière au Canada puisque notre industrie s’appuie davantage sur le savoir universitaire.La recherche gouvernementale à l’interne joue également un rôle indispensable.Même en période d’austérité, un engagement continu à l’égard de la recherche subventionnée par l’État est essentiel pour donner au Canada les outils dont il a besoin pour vaincre l’austérité.Même des réductions temporaires causeraient des dommages qui pourraient prendre des décennies à réparer.Dans son dernier rapport[4] , le Conseil des sciences, de la technologie et de l’innovation (CSTI) a conclu que « la force du Canada se trouve dans sa solide réserve de talents et dans sa capacité élevée de recherche d'intérêt public ». Pour maintenir les deux, nous recommandons ce qui suit :

  1. Que le gouvernement fédéral augmente d’un modeste 5 % les budgets des conseils subventionnaires afin de financer leurs programmes qui appuient la recherche fondamentale. Coût : environ 120 millions de ée.
  2. Que les économies proposées qui découlent des réductions imposées au Programme de bourses d’études supérieures du Canada servent à financer les bourses de doctorat et les bourses postdoctorales dans les universités et l’industrie, en réacheminant les fonds aux programmes actuels des conseils subventionnaires. Coût : 17,5 millions de dollars par année pour financer, par exemple, 415 étudiants au doctorat et  bourses postdoctorales chaque année.
  3. À une époque où le gouvernement fédéral, à l’instar de plusieurs autres, cherche activement à réduire les dépenses, que le Canada s’inspire d’autres gouvernements européens3 en reconnaissant l’importance unique des programmes scientifiques gouvernementaux et en s’assurant que tous les programmes de recherche gouvernementale essentiels sont financés correctement afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs mandats.

Pourquoi demanderions-nous d’augmenter les dépenses dans une période d’austérité? Le Comité permanent des finances de la Chambre des communes s’intéresse « en particulier »aux réflexions et aux suggestions des Canadiens quant aux moyens de stimuler la création d'emplois et l'investissement des entreprises afin d'assurer à tous la prospérité et un niveau de vie élevé. La plupart des économistes s’entendent[5] pour dire que la prospérité d’une nation est de plus en plus tributaire de sa capacité à innover. On estime que l’innovation technologique représente environ plus de 50 % de la croissance économique des pays avancés[6] ,[7]. La recherche et les personnes hautement qualifiées sont des éléments essentiels de l’innovation technologique laquelle, en retour, nous engage sur la voie de la croissance durable de l’emploi et de la prospérité

Pourquoi ne pas réduire un peu nos dépenses maintenant et les accroître lorsque les choses iront mieux? Cette façon de faire pourrait être la mesure à prendre pour de nombreuses activités.Toutefois, comme la plupart des capacités de recherche remarquables, le Canada a mis des décennies pour les établir.Si on ne maintient pas le cap maintenant, des dommages irréparables pourraient être causés.Les coupes dans la recherche signiferaient que nous accuserions beaucoup de retard par rapport aux autres pays. Dans son prochain plan sur sept ans, l’Union européenne, qui se heurte à des difficultés nettement plus importantes que le Canada, a récemment proposé une augmentation de 45 % des dépenses allouées à la recherche et à l’innovation, ne prévoyant aucune augmentation pour la plupart des autres secteurs importants[8] !

L’investissement dans l’éducation et la recherche est une priorité absolue. En période de crise économique, les investissements sont plus que jamais indispensables.Ministère de l’Éducation et de la Recherche de l’Allemagne. Juillet 2011

Où nous sitons-nous actuellement au plan de l’innovation? Malheureusement, diverses études8 réalisées ne cessent de déclarer l’échec du Canada en matière d’innovation. En conséquence, la croissance de notre productivité a été médiocre, les gains réels n’ont pas progressé depuis 1980 et le niveau àd’autres pays[9] .

Qu’en est-il de l’avenir? Les pays émergents, qui comptaient jadis une réserve de main-d’œuvre à bon marché, sont en bonne voie de devenir des concurrents très féroces dans le secteur de la technologie.En 2008, par exemple, c’est une société chinoise qui a déposé le plus de brevets. En 2006, quatre pays, soit le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine, ont formé la moitié plus de diplômés au doctorat que tous les pays de l’OCDE réunis[10] . La Chine comptera bientôt un plus grand nombre de chercheurs que les États-Unis et l’Union européenne[11] . Deux entreprises indiennes sont parmi les plus importantes sociétés en TI du monde.

Et qu’en est-il de notre secteur des ressources? Il n’est pas à l’abri de nos principaux concurrents étrangers.Par exemple, pour produire du nickel affiné, la Chine a mis au point une méthode novatrice et moins coûteuse que la méthode canadienne, et leur production est déjà plus élevée que celle de Sudbury[12] .

Il n’y a qu’une réponse : les économistes et les gens d’affaires demandent que és sur la recherche fondamentale (recherche entreprise – habituellement dans les universités –ne visant pas une application précise immédiate) :

« Une vague de projets d’innovation à faible coût ébranlera la fondation de bien des industries [du monde riche]. » The Economist, 17 avril 2010

Les gouvernements devraient investir dans l’infrastructure qui appuie l’innovation, allant des réseaux d’électricité modernisés .... en passant par la recherche fondamentale et les études universitaires. C’est une des trois seules recommandations que le magazine The Economist a effectué auprès des gouvernements en 2010[13] pour assurer les emplois de l’avenir.

Les innovations qui ont amélioré la productivité et la qualité de vie de notre pays proviennent essentiellement des résultats de la recherche fondamentale. Maintenant, plus que jamais, la recherche écessaire pour tracer la voie à suivre. » Joint Economic Committee du Congrès américain, 2010[14] .

« Les percées scientifiques représentent le meilleur outil sur lequel l’humanité doit miser ... pour assurer sa survie. » Neil Reynolds, Globe and Mail[15] .

[Nos] recommandations ... reposent sur une hypothèse clé : Que le gouvernement maintienne son engagement à financer de la recherche qui offre peu sinon aucun potentiel d’application commerciale [immédiate]. … Le Canada ne parviendra pas à mettre en place un meilleur cadre de commercialisation en l’absence d’une collectivité de recherche dynamique, vouée à l’excellence dans la création et l’application des connaissances.Groupe d’experts sur la commercialisation composé de représentants du secteur privé mis en place par Industrie Canada (2006)[16].

Les investissements dans les conseils de recherches génèrent un rendement plus élevé que les initiatives sous forme de crédits d’impôt pour la recherche et le développement  du secteur privé. Éditorial publié dans le magazine Nature, faisant référence à une recherche effectuée par les économistes J. Haskel et G. Wallis au Royaume-Uni[17].

Comment la recherche fondamentale peut-elle éventuellement nous aider? La recherche appliquée (ou « orientée ») est, bien entendu, essentielle.Mais les percées les plus importantes proviennent de la recherche fondamentale.Comme l’a mentionné le Groupe d’experts d’Industrie Canada :« ... personne ne peut prédire quelles pistes de recherche produiront des percées d’importance critique. » Les percées imprévues à tous égards occasionnent de nouvelles possibilités bien réelles pour la recherche appliquée dans les universités et l’industrie, et facilitent l’innovation à partir des percées d’aujourd’hui, et non pas celles d’hier! Comme mentionné précédemment, les retombées du Web en sont un bon exemple. La recherche fondamentale est à la base du développement de l’informatique et de l’électronique modernes, des technologies de communication modernes, des autres technologies au laser, des traitements médicaux, des rayons X, des appareils d’IRM, de la tomographie par émission de positons et d’une foule d’autres avancées dont les répercussions économiques et sociales ont transformé notre monde.

Pourquoi l’industrie ne s’y met-elle pas aussi? Des études ont révélé à maintes reprises que les avantages des percées découlant de la recherche fondamentale profitent principalement à l’économie et à la société en général, plutôt qu’aux organismes effectuant la recherche.De surcroît, la nature imprévisible de la recherche fondamentale signifie qu’un programme fructueux nécessite un travail de longue durée dans de nombreuses disciplines, ce qui constitue une entreprise coûteuse.

Si les retombées de la recherche fondamentale se répercutent partout dans le monde, pourquoi ne pas confier le soin à d’autres pays de la faire à notre place? Les données révèlent qu’aucun pays ne peut espérer profiter des retombées sans contribuer lui-même au système scientifique mondial.Des recherches de pointe de calibre mondial dans une vaste gamme de disciplines règlent des problèmes et créent des possibilités que l’industrie et le gouvernement peuvent exploiter, généralement dans le même pays d’où émane la recherche (voir quelques exemples[18]). Dans son sillage, elle entraîne une augmentation de la recherche industrielle[19], un facteur très important pour le Canada. Au Canada, cela se traduit par de nouvelles sociétés dérivées directement de la recherche universitaire canadienne.Ces recherches jouent aussi un rôle dans la création de villes vivantes, créatives et économiquement performantes[20], comme Waterloo, en Ontario, et donc, indirectement, à créer des entreprises telles que Research in Motion.  Essentiellement, elles permettent au Canada d’accéder aux réseaux personnels internationaux par lesquels se transfère une grande partie de la technologie, du savoir-faire et des idées provenant de l’étranger.L’un des rôles essentiels de la recherche fondamentale consiste à éduquer et inspirer la nouvelle génération de chercheurs et de dirigeants, et à attirer des étudiants étrangers au Canada (qui, à eux seuls, contribuent pour une somme de 6,5 milliards de dollarspar année à notre économie[21]).

Beaucoup des répercussions de la recherche fondamentale étant étendues, elles sont difficiles à quantifier. Mais une de celles-ci (nouvelles entreprises dérivées directement de la recherche universitaire canadienne en sciences naturelles et en ingénierie, sur une période s’étalant sur près de 40 ans) a récemment fait l’objet d’estimations très prudentes[22]. On estime que l’incidence économique, provenant de l’augmentation des exportations, est de trois à quatre fois plus grande que les sommes totales investies par les gouvernements fédéral et provinciaux dans la recherche, de façon directe ou indirecte, pendant toute cette période, permettant même la valeur de rendement de l’argent.En outre, les gouvernements eux-mêmes recevront plus en impôts supplémentaires que ce qu’ils auront dépensés.

Ne dépensons-nous pas déjà assez? Le Canada obtient le 6e rang parmi les pays de l’OCDE[23] en ce qui a trait au soutien du gouvernement à la recherche universitaire en pourcentage du PIB. Mais malgré les importantes mesures de stimulation prises par le gouvernement pendant plusieurs années, les dépenses[24] en R-D au sein de l’industrie demeurent faibles au Canada. Ce problème récurrent porte à croire qu’il pourrait s’agir d’enjeux structuraux, d’où son caractère permanent[25]. Par contre, le pourcentage de la recherche universitaire canadienne appuyée par l’industrie (quoique petite comparée à l’aide financière du gouvernement) se classe au deuxième rang des pays du G7 derrière l’Allemagne seulement et il représente 50 % de plus que la moyenne des pays du G7[23]. Dans plusieurs cas, l’industrie semble donc financer la R-D appliquée dans le milieu universitaire (en prenant appui sur les travaux de base antérieurs entrepris dans les universités) plutôt que de le faire à l’interne. Cela veut dire que la santé de la recherche universitaire revêt une importance encore plus grande au Canada qu’ailleurs dans le monde, et qu’un investissement nettement supérieur consenti par le gouvernement est essentiel pour aider à contrebalancer le piètre succès de l’industrie.

Selon le Conference Board[5] et le SCTI[4], les résultats scientifiques (surtout la recherche fondamentale universitaire) et le personnel hautement qualifié sont les seuls atouts dans le classement médiocre du Canada sur les index internationaux en matière d’innovation. En s’attaquant aux secteurs qui posent problème, nous devons continuer de veiller au développement de ces atouts. Le Groupe d’experts d’Industrie Canada l’a bien formulé :Le défi que devra le gouvernement sera d’augmenter, et non simplement de maintenir, ses investissements dans la recherche financée par les fonds publics, tout en encourageant la R-D dans le secteur privé.

Et justement, parlant de recherche financée par les fonds publics, qu’en est-il de la recherche effectuée à l’interne par le gouvernement? La recherche gouvernementale joue aussi un rôle unique et indispensable dans la contribution qu’elle apporte à la prospérité économique et à la protection de la santé et du bien-être des Canadiens.Elle a également contribué à nombre des réalisations scientifiques et technologiques les plus importantes du Canada, lesquelles ont eu des répercussions considérables au plan socioéconomique.Parmi les produits découlant de la recherche fondamentale et de la recherche appliquée entreprises par le gouvernement fédéral, mentionnons notamment des centaines de nouvelles variétés de blé, un vaccin pour la méningite C (réduisant l’incidence de la maladie pour des millions d’enfants à l’échelle mondiale), le béton anticorrosion et un simulateur pour les chirurgies du cerveau qui accroîtra la sûreté des chirurgies pour un nombre incalculable de patients; et, bien entendu, le canola, lequel contribue à lui seul pour une somme de 2 milliards de dollars par année à l’économie du Canada.

Que permet d’accomplir aussi la recherche gouvernementale à l’interne? Elle permet de soutenir l’élaboration de politiques publiques, les règlements et la prise de décisions; nos programmes de santé et de sécurité publiques; et l’élaboration et la gestion des normes nationales et internationales.Elle permet de fournir des avis impartiaux et qui font autorité aux décideurs gouvernementaux, lesquels servent à mesurer les pressions concurrentes s’exerçant sur les ressources.Elle assure le savoir-faire nécessaire pour exécuter le Programme d’aide à la recherche industrielle qui connaît un succès extraordinaire, et qui permet de fournir des fonds aux entreprises à une étape critique du développement de produit.Du SRAS au dendroctone du pin ponderosa, en passant par la qualité de l’eau et de l’air, les stocks de poissons et les garanties nucléaires, la santé des Canadiens, l’environnement et la prospérité économique sont tributaires de la capacité du gouvernement à surveiller efficacement les problèmes graves et à trouver des solutions.Peu de ces capacités pourraient être sous-traitées ailleurs.

Qu’en est-il de l’importante infrastructure de recherche financée par le gouvernement? Le gouvernement fournit une infrastructure scientifique (et le savoir-faire pour la faire fonctionner), laquelle est utilisée par plusieurs organismes.À titre d’exemple, le réacteur NRU de Chalk River est un outil essentiel pour les universités et l’industrie, y compris pour les secteurs de l’aérospatiale, de l’automobile et de la fabrication.La caractérisation évoluée des matériaux, au moyen des méthodes inventées à Chalk River et qui ont été adoptées dans le monde entier facilite la mise au point de produits plus sécuritaires, plus fiables et moins onéreux, améliore la compétitivité du Canada et permet d’ouvrir de nouveaux marchés. D’autres grandes capacités financées par l’État, lesquelles sont essentielles pour assurer la compétitivité du Canada, comprennent les rayons X intenses au Centre canadien de rayonnement synchrotron, les muons pour la caractérisation des matériaux à TRIUMF et diverses installations métallurgiques au Laboratoire de la technologie des matériaux de CANMET.

En résumé : L’avenir du Canada dépend d’une nette amélioration de l’innovation. La recherche fondamentale universitaire (pas nécessairement financée par le gouvernement) en physique et dans d’autres domaines est un facteur crucial de l’innovation, d’autant plus que l’industrie dépense très peu au Canada pour sa propre R-D. Les experts du Canada et d’ailleurs s’entendent pour dire qu’il faut accroître l’appui à la recherche fondamentale.À elles seules, les sociétés dérivées de l’université qui découlent directement de la recherche fondamentale canadienne amortissent largement l’aide financière gouvernementale consentie.La recherche fondamentale et le personnel hautement qualifié sont les atouts du Canada au chapitre de l’innovation.Nous devons continuer de soutenir et d’assurer leur essor tout en favorisant également le secteur de la recherche appliquée.Nous devons absolument prendre toutes les mesures nécessaires pour ne pas perdre les précieuses capacités de recherche au sein du gouvernement lui-même.

Recommandations

1. Les conseils subventionnaires représentent le fondement même du soutien à la recherche fondamentale au Canada et suscitent beaucoup d’admiration dans le monde entier. Bien que le financement octroyé aux programmes de recherche appliquée des conseils ait sensiblement augmenté ces dernières années, il s’avère essentiel de soutenir davantage la recherche fondamentale afin d’assurer la prospérité future du Canada.Il est indispensable de financer la science novatrice en ayant un impact à long terme afin d’alimenter le pipeline qui améliore la compétitivité économique.Reconnaissant ce fait, les budgets de 2010 et de 2011 ont effectivement augmenté l’enveloppe des conseils pour la recherche fondamentale – une petite augmentation qui a tout de même été bien accueillie.Pourtant, un grand nombre de chercheurs jouissant d’une excellente réputation d’après les normes d’excellence internationales (c.-à-d. méritant indiscutablement d’être financés) n’obtiennent toujours pas de financement; dans le secteur de la recherche en santé, par exemple, seulement environ 25 % de leurs propositions de recherche sont généralement financées.Des personnes extrêmement compétentes sont donc incapables de faire apport de leur travail de recherche aux efforts déployés pour accroître l’innovation et la création de richesses.De surcroît, les compressions imposées aux conseils en 2009 réduiront leurs budgets de 87 millions de dollars par année pour l’exercice de 2011‑2012 et au-delà. L’ACP recommande donc ce qui suit :Que le gouvernement fédéral augmente d’un modeste 5 % les budgets des conseils subventionnaires afin de financer leurs programmes qui appuient la recherche fondamentale.Coût : environ 120 millions de dollars par année.

2. Les étudiants au doctorat et les boursiers de recherches postdoctorales occupant leur premier poste après leurs études représentent une partie essentielle de nos efforts de recherche. En outre, ils constituent la prochaine génération de chercheurs et d’innovateurs, et nous devons encourager nos meilleurs cerveaux à rester au Canada.Par rapport à notre population, toutefois, le Canada forme 35 % moins de diplômés au niveau du doctorat, qui est crucial, que la moyenne des pays de l’OCDE ou des États-Unis[26]. Reconnaissant cela, le Canada y a remédié en élargissant le Programme de bourses d’études supérieures du Canada (PBESC). Toutefois, après 2011-2012, le budget du PBESC pour les étudiants au doctorat sera réduit de 17,5 millions de dollars.L’ACP recommande donc ce qui suit :Que les économies proposées qui découlent des réductions imposées au PBESC servent à financer les bourses de doctorat et les bourses postdoctorales dans les universités et l’industrie, en réacheminant les fonds aux programmes actuels des conseils subventionnaires.Coût : 17,5 millions de dollars par année pour financer, par exemple, 415 étudiants au doctorat et 250 bourses postdoctorales chaque année.

3. La science gouvernementale joue un rôle unique et essentiel au chapitre de l’innovation et de la compétitivité économique.Nombre de ses fonctions ne peuvent être entreprises ailleurs.Les ministères et organismes à vocation scientifique ont déjà fait l’objet de compressions de 5 % entre 2007 et 2011. De surcroît, pendant plusieurs années, le Canada a accusé beaucoup de retard par rapport à la moyenne des pays du G7 et des pays de l’OCDE pour la R-D du gouvernement à l’interne comme pourcentage du PIB[23].  Des compressions supplémentaires importantes causeraient des dommages irréversibles.L’ACP recommande donc ce qui suit :À une époque où le gouvernement fédéral, à l’instar de plusieurs autres, cherche activement à réduire les dépenses, que le Canada s’inspire d’autres gouvernements européens[3] en reconnaissant l’importance unique des programmes scientifiques gouvernementaux et en s’assurant que tous les programmes de recherche fondamentale essentiels sont financés correctement afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs mandats.


NOTES DE FIN DE DOCUMENT ET SOURCES D’INFORMATION

[1] Consulter, par exemple, l’article de S. Avery, « Idea finally spins gold for Web’s inventor », paru dans The Globe and Mail, Toronto (15 juin 2004).C’est en 1989 que Tim Berners-Lee a inventé le Web, alors qu’il travaillait à l’Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire (CERN), laboratoire européen de collaboration internationale pour la physique des particules.L’idée est venue du besoin de faciliter le partage et la mise à jour de l’information au sein de la communauté de la physique subatomique internationale.Les Canadiens sont très actifs au CERN depuis de nombreuses années.

[2] 2 L. Lederman, The God Particle. If the Universe is the Answer, What is the Question?Houghton Mifflin, Boston, 1993

[3]3 C. Macilwain, Nature 475 14-15 (5 juillet 2011) et Commission européenne, A Budget for Europe 2020 (29 juin 2011), budget qui prévoit une augmentation du financement des organismes scientifiques gouvernementaux. En outre, les organismes de recherches allemands sont assurés d’obtenir une augmentation de 5 % du gouvernement allemand http://www.bmbf.de/en/96.php. La France et l’Espagne sont deux des pays de l’Union européenne qui ont également augmenté leurs dépenses en recherche pour 2011.

[4] 4 Science, Technology and Innovation Council, State of the Nation, 2010 (2011).

[5] 5 Le Conference Board du Canada résume bien la situation : « L’innovation est essentielle pour obtenir une économie au rendement élevé.Cela est également crucial pour la protection de l’environnement, un système d’éducation à rendement élevé, un système efficace de promotion de la santé et des soins de santé ainsi qu’une société inclusive.Sans innovation, tous ces systèmes stagnent et le rendement du Canada se détériore par rapport à celui de ses pairs. » (A Report Card on Canada, Innovation, février 2010).

[6] 6 M. Pianta, Technology and Growth in OECD Countries, 1970-1990, Cambridge J. of Economics 19 (1) 175-187 (1995).

[7] 7 C. Jones, Sources of U.S Economic Growth in a World of Ideas, American Economic Review 92 (1) 220-239 (2002). Cette étude (et l’estimation de 50 %) englobait cinq pays :les États-Unis, l’Allemagne, le Japon, la France et le Royaume-Uni.

[8] 8 Voir la référence 5 pour obtenir un exemple. Le Canada se classe au 14e rang dans un groupe de 17 pays semblables et, comme d’habitude, reçoit une note globale de « D » (la plus faible note).Sur 12 indicateurs de l’innovation, le Canada reçoit un D pour neuf indicateurs, et un C pour deux autres.Sa seule note B concerne les articles scientifiques, un domaine dont le dynamisme est en grande partie redevable au milieu universitaire.

[9] 9 TD Financial Group, Post-secondary Education is a Smart Route to a Brighter Future for Canadians. Standard of Living and Education Linked to High Degree (17 mai 2010), d’après les données de l’OCDE.

[10] 10 OECD Science, Technology and Industry Scoreboard (OCDE, 2009), p. 17 et 135.

[11] 11 Hugo Hollanders et Luc Soete, Rapport de l’UNESCO sur la science 2010, p. 10.

[12] 12 A. Hoffman, « A breakthrough in China, another blow for Sudbury », Report on Business du Globe and Mail, p. 1, 4 (11 juin 2010).

[13] 13 The Economist (7 août 2010), p. 9. Les autres recommandations visaient à améliorer le contexte commercial et à encourager les « gagnants » à se manifester plutôt que d’essayer d’être sélectionnés.

[14] 14 Joint Economic Committee du Congrès américain, The Pivotal Role of Government Investment in Basic Research (mai 2010).

[15]15 Neil Reynolds, Report on Business du Globe and Mail (4 décembre 2009), p. B2.

[16] 16 Les gens et l’excellence : au cœur du succès de la commercialisation – Rapport ’experts sur la commercialisation, Industrie Canada (2006).

[17] 17 « Value-Adding Enterprise », Nature (éditorial) 466 p. 296 (15 juillet 2010), faisant référence à J. Haskel et à G. Wallis, Centre for Economic Policy Research, Discussion Paper 7725 (mars 2010).

[18] 18 À titre d’exemple : (i) Mme Andreas Mandelis, membre de l’ACP, professeure à l’Université de Toronto, a lancé une entreprise appelée Quantum Dental Technologies.L’entreprise offre un dispositif de détection précoce au moyen d’une technique laser spéciale qui, au dire de l’entreprise, permet de détecter les caries dentaires avant les rayons X. La dent peut ensuite être reminéralisée sans fraisage ni obturation.(ii) Le CRSNG a indiqué que les nouvelles entreprises dérivées (habituellement par un membre d’une faculté) de la recherche universitaire canadienne appuyée par le CRSNG avaient des revenus annuels de plus ou moins 3,5 milliards de dollars en 2004, et que ces revenus provenaient surtout des exportations.Le travail mentionné à la note 22 indique que la physique, même si elle est très « sommaire », a été plus efficace à générer un impact économique de cette façon que l’ensemble des sciences naturelles et du génie.(iii) Des physiciens de l’Université de Montréal ont trouvé une façon de produire la caméra astronomique la plus sensible du monde.Cela permettra non seulement d’obtenir des images plus claires de l’espace, mais cela pourrait ouvrir de nouveaux horizons en imagerie médicale, permettant d’obtenir un diagnostic précoce d’anomalies avant qu’elles ne s’aggravent.(iv) Un physicien de l’UBC a trouvé une façon économique de canaliser les rayons du soleil en profondeur à l’intérieur des édifices.Cela devrait permettre de réduire la consommation d’énergie d’au moins 25 % et d’offrir des avantages pour la santé.(v) On compte bien d’autres articles percutants du CRSNG à http://www.nserc-crsng.gc.ca/Media-Media/ImpactStories-ArticlesPercutants_fra.asp.

[19] 19 A.B. Jaffe, Real effects of academic research, American Economic Review 78, 957-970.

[20] 20 La région de Kitchener-Waterloo arrive maintenant au 2e rang, derrière Toronto, dans la liste publiée par la CIBC sur les régions canadiennes les plus performantes au plan économique : voir http://micro.newswire.ca/release.cgi?rkey=1907185856&view=14730-0&Start=0&htm=0 . Research In Motion est la plus importante entreprise du Canda spécialisée dans la technologie, OpenText Corporation est la plus importante société de génie logiciel et COM DEV est sa plus grande entreprise satellite : voir http://www.communitech.ca/.

[21] 21 Roslyn Kunin & Associates. Impact économique du secteur de l’éducation internationale pour le Canada, Rapport final présenté à Affaires étrangères et Commerce international Canada (2009); voir http://www.international.gc.ca/education/assets/pdfs/RKA_IntEd_Report_fra.pdf.

[22] 22 P.S. Vincett, The economic impacts of academic spin-off companies, and their implications for public policy, Research Policy 39 736-747 (2010).

[23] 23 OCDE, Main Science and Technology Indicators, Volume 2011/1 (2011), pages 69, 71 et 76.

[24] 24 J. Niosi, Choices. Connecting the Dots between University Research and IRPP (2008), p. 9.

[25] 25 Il peut y avoir plusieurs raisons pour cela, notamment la nature d’économie de filiale de nombreuses entreprises canadiennes, la nature de la majorité des industries primaires, etc.

[26] 26 OECD Science, Technology and Industry Scoreboard (OCDE, 2009), p.17 et 135. La revue The Economist (voir la note en bas de page 13) signale que la Chine et l’Inde, à elles seules, comptent chaque année 135 000 nouveaux diplômés de 2e et 3e cycles en ingénierie et en informatique.